Dur temps pour la fête et la célébration des cultures électroniques. Depuis quelques semaines, les annulations de fête hors-club s’enchaînent. Hasard ou politique de répression, besoin de remettre le fêtard derrière quatre murs, question de contrôle et d’encadrement des flux, impuissance et incompréhension du haut face à une nouvelle manière du bas, plus punk et rebelle, de gérer sa nuit ? La question court toujours. Le message n’est pas très clair, mais pour beaucoup, entre optique de bouleversement des paysages urbains pré-jeux olympiques et gonflement du Grand Paris à tout prix, cela n’augure… rien de bon.
Après les annulations successives des soirées techno Possession x Raw et Fée Croquer, le weekend du 15 septembre, c’était au tour de Brakage, collectif pluridisciplinaire d’annoncer la triste nouvelle : leur soirée prévue en hangar le samedi 13 octobre, était annulée. Au dernier moment, la mairie d’Aubervilliers refuse de céder les locaux prévus…
C’était un lundi 8 de ramasse comme un autre et les membres de Brakage annonçaient la triste nouvelle : plus de teuf, ART ATTACK est annulé. Retour sur le message posté aux internautes le jour même.
« // NOUS ACCUSONS //
La deuxième édition de notre festival pluridisciplinaire, Art AttaK jusqu’au petit matin ☾, aurait du se dérouler le 13 octobre dernier, avec au total une vingtaine d’artistes et intervenants de disciplines diverses et variées (musique, photographie, ateliers participatifs, poésie, tatouage, installation, sculpture, DJ sets, mode, performances…)
La mairie d’Aubervilliers nous a confirmé la mise à disposition gracieuse du local (de type hangar) en juillet.
Tout le collectif a donc passé l’été à travailler sur ce projet ambitieux.
Pour un collectif indépendant de toute institution financière ou commerciale, célébrer ses 1 an avec un événement aussi important semblait de l’ordre du rêve, et nous avions réellement envie de créer de moment de « vivre ensemble » en tant que membres de la vie culturelle et artistique parisienne.
Après plusieurs lapins posés à la dernière minute par des représentants de la mairie d’Aubervilliers lors de visites prévues, nous étions réduits à visiter les lieux à environ dix jour du début de l’événement. Ce qui en terme d’organisation ne nous arrangeait pas du tout. Mais soit.
Les représentants de la mairie d’Aubervilliers nous avaient certifié qu’il y aurait une visite lundi dernier à 14 h. Nous avons donc donné rendez-vous à 14 h à plusieurs artistes qui devaient exposer ou performer pendant Art Attak, mais également des prestataires et amis du collectif (Terrain Vague ; Martopitek ; Might pour ne citer que ceux là). Deux heures avant la visite, alors que l’événement était confirmé depuis juillet, nous recevons un message de notre interlocuteur à la mairie pour dire que « du à un arrêté préfectoral nous ne pouvons plus vous prêter le lieu. Les événements de plus de 150 personnes doivent avoir une sécurité renforcée que nous ne pouvons pas vous fournir. »
Très bien, dans ce cas nous utiliserons nos fonds pour avoir de la sécurité supplémentaire ? Ou alors nous limiterons l’entrée à 150 personnes pour faire coûte que coûte cet événement et ne pas voir tous nos efforts jetés à la poubelle ? Leur réponse : « En fait pour une question de sécurité il faudrait agrandir les passages du hangar et nous ne pouvons pas le faire. » Et ce n’est pas possible de bloquer les passages et n’utiliser qu’une partie du lieu ? Leur réponse : « Non. »
Autrement dit, la mairie d’Aubervilliers nous a proposé un lieu qui n’est pas viable et avait pourtant tout son temps pour y remédier.
Et si les raisons mentionnées n’avaient rien à voir et qu’en fait toute cette histoire n’était que la suite de la politique repressive des cultures « non-hégémoniques » que met en place Valerie Pécresse (LR) présidente du conseil régional d’Île de France, qui veut notamment un « doublement des peines » dans les quartiers « les plus criminogènes » ?
C’est donc avec le coeur lourd que nous vous avons annoncé l’annulation (ou devrais-je dire le report, si nous arrivons à trouver un lieu adapté au printemps) de notre festival Art AttaK jusqu’au petit matin ☾.
Brakage se rajoute donc à la liste des collectifs qui se voient mettre des bâtons dans les roues, après il y a deux semaines l’annulation des événements de nos collectifs aînés Possession et Fée Croquer.
Nous voulons donc remercier toutes les personnes impliquées dans le projet Art Attak :
Louis Motin, Utopia 56 – Utopia 56 Paris et Ile-de-France, Céleste Gatier, Hors PairE, Leonardo Nicoletti Photography, Julien Rg, Clément Nourry, Nozak Vasil, Todasana, 37 Melo (2T & Esno), delta JAM , Alexandra Colart, Theo Baize, Lea Fréry Waldmann, Axel Picodot, Sam Lux, ottoman.grüw, Iannis Rezgui / Solah, ZEPHYMIR, Saunö (Saumon& Sansö), Terrain Vague, Le Bercail, Richard’s Hot Dog; Heeboo, Heetch, Beat à l’air, PWFM, LE LAB Festival, SAKATRAK, et notre équipe de bénévoles super motivés. On espère n’oublier personne.
Pour se consoler nous vous invitons avec tout notre amour à continuer la fête à notre prochain événement, le 10 novembre pour Brakage 2.0 – le turfu au Le Gambetta Club.
“À vouloir étouffer les révolutions pacifiques, on rend inévitables les révolutions violentes.” – John Fitzgerald Kennedy
À méditer. »
Dur. L’occasion pour nous de poser quelques questions à la team. Jean, Thomas et Clément s’expliquent, entre coup de gueule et besoin de nuancer la pensé : réactions, convictions, vision du futur d’une fête peut-être plus radicale ? Plus de communication et de solidarité entre organismes de fête et autorités ? Les possibilités sont multiples. Rencontre.
Thomas : Les autorités ne sont pas encore totalement habituées à cette nouvelle vague que représente la fête libre, il est vrai que ce contexte est plus propice aux débordements et c’est sur ce point qu’ils ont bloqué selon moi.
Clément : Je serai plus nuancé que les autres je pense. A mon sens c’est aussi leur travail de prévenir
Thomas : Je pense que tout va s’arranger, de notre coté nous n’avons rien à nous reprocher donc c’est au gouvernement de s’informer correctement sur le déroulement et l’importance de ces événements. Sinon tant pis, ça passera quand même.
Clément : À mon sens on voit déjà des choses positives,
Jean : A vouloir étouffer les révolutions pacifiques, on rend inévitables les révolutions violentes. Bisous les michtos.