INTERVIEW DU TEUFFEUR 6.0 – Le teuffeur 6.0, c’est le mec, la nana, la créature nocturne de demain, inspiré des folies d’hier, qui prend son envol dans les nuits et les matins d’aujourd’hui. C’est cet oiseau pour qui la fête est respiration, vitale, comme une bouffée d’air indispensable au bon déroulement des choses, comme un cachet qui rend aimable. On continue notre série de l’été avec le portrait de Rania.
Journaliste de 24 ans au ton libéré et impertinent, Rania c’est un peu le boute-en-train, la militante de la nuit, qu’il manque à ton quotidien, ou plutôt à tes virées nocturnes. Toujours chaude comme la braise pour fêter même quand il n’y a rien à fêter, on la croise souvent, petit pèlerin des teufs queers de la capitale, d’un bar de quartier à une soirée techno, le smile en avant et la bonne humeur au bout du poing. Portrait.
Prénom : Rania
Ton âge : 24 ans
Ta première soirée en club c’était quoi ?
Oh je devais avoir 15 ans… C’était un club à Rabat, la ville où j’ai grandi. Ça s’appelait le Privé, c’était en 2008 je dirais. J’étais avec mes copains de lycée et mes talons. La première et dernière fois d’ailleurs que j’ai porté ces machins en club.
Une anecdote ?
C’était un lieu couru par les petits jeunes péteux du lycée français. Une sorte de Silencio avec supplément acné. C’était pas glorieux. On y passait Bob Sinclar et Martin Solveig et les mecs payaient du champagne hors de prix à des meufs en mal de sensations. Je n’en garde pas un souvenir ému.
“En 2010 quand je suis arrivée à Paris, il y avait des weekends où il ne se passait rien. “
Ta plus belle et mémorable anecdote de soirée c’est quoi ?
Ohlalala, faut pas montrer ça à ma mère… La fois où j’ai atterri chez un trader qui habitait un immense loft dans Meatpacking à New York et que j’avais l’impression d’être sur un set de film : des mannequins partout, un hélico stationné au dessus de l’immeuble, une immense orgie, de la poudre en vases entiers, on s’arrête là ?
La fête, ça tient quelle place dans ta vie ?
C’est toute ma vie.
Tu as l’impression qu’on fait de plus en plus la fête à Paris ou le contraire ?
BIEN PLUS !!! Y a trois fêtes cools par semaine maintenant. Avant, en 2010 quand je suis arrivée à Paris, il y avait des weekends où il ne se passait rien.
Et ça vient d’où, d’après toi ?
Des collectifs qui se bougent, une belle brochette de programmateurs, de producteurs, d’organisateurs. On se souviendra de cette génération.
Toi, c’est quoi qui te pousse à sortir le soir ?
Ce moment de la soirée –il y en toujours un- où je me dis “la vie est belle”.
On pense quoi des after ?
Je ne suis pas très after en ce moment. Je pense que je commence à développer une sorte de phobie cheloue quand je vois le soleil se lever. Ça me rappelle des retours trop violents à la réalité. Du coup, j’évite. Mais la dernière Péripate était cool.
Ton record de fête, c’était quoi ?
50 heures. C’était l’anniversaire d’une pote. J’ai dû dormir trois heures en tout ; tu connais l’histoire : ça commence dans un appart, ça finit en club, ça s’en va en after, ça se laisse convaincre de bruncher puis de boire quelques coups au Rosa (Rosa Bonheur, ndlr) et ça finit encore en club, etc, etc
“A l’intérieur c’était le feu. Bouillant, ça brûlait littéralement. “
Ton plus grand fail de soirée ?
Une Possession, je me souviens pas de ce qui s’est passée entre 2 h et 11 h du matin. J’ai chopé la crève pendant une semaine après ça. En mode fièvre froide, impossible de bouger du lit. Et bien sûr, toutes les fois où j’ai croisé un-e ex récent-e.
Tu arrives au bar, c’est quoi le truc que tu commandes direct ?
De la biègh, pardi.
Ton track de la teuf ?
Tu choisis comment tes soirées ?
Tout ce qui a 0 queerness dans son ADN dégage d’emblée et après je fais en fonction du line-up et de mes potes. Souvent, je vais en soirée à la dernière minute.
Ta plus belle nuit en club ?
Y en a eu plein des belles soirées ! Elles le sont toutes (smiley de l’ange) Je crois que la dernière fois où je me suis dit “waaaaah c’était ouf”, c’était en octobre dernier à Berlin au Kitkat Club. Les gens étaient complètement décomplexés, y avait un mec, une espèce de Jésus de la nuit sur une balançoire qui plongeait de temps en temps dans le plus simple appareil dans une piscine qui devait être à–20 degrés. Et à l’intérieur c’était le feu. Bouillant, ça brûlait littéralement. Berlin quoi.
Tu chopes ou tu te laisses choper ?
Les deux, mon capitaine. Pourquoi ? Parce que c’est deux fois plus de plaisir, voyons.
Tu seras quel type de teuffeur dans dix ans ?
Je ferai des apéros dînatoires chiants comme tous les vieux, et je dirai : “en octobre 2016 à Berlin, j’ai vu Jésus à poil dans une piscine..” Et mes potes répondront : “heureusement que tu t’es calmée sur les substances toi… “
Et tes gosses (si gosses il y a), ils sortiront comment dans 20 ans ?
Je crois que dans 20 ans les gens auront plus besoin de drogues pour être(super) heureux en soirée. On inventera des waves et des beats qui agiront comme de la d. CF : les dernières pages de Vernon Subutex 3.
Tu fais quoi dans la vie d’ailleurs, officiellement ?
Je suis journaliste, officiellement
Et plus officieusement, tu aimerais te présenter comment ?
Papillon de nuit, je sais c’est nul mais il faut que je me dépêche, j’ai une soirée qui m’attend.
Un samedi comme un autre, 3 h du mat’, on te trouve où ?
Certainement aux toilettes mais pas toujours pour la même raison.