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DR ELFA : « La fête seule n’a pas de sens pour moi, elle doit “célébrer” quelque chose et non pas être l’omniprésence de ma vie » – Heeboo

DR ELFA : « La fête seule n’a pas de sens pour moi, elle doit “célébrer” quelque chose et non pas être l’omniprésence de ma vie »

Teuffeur du Turfu - Novembre 14, 2019

Phili Foto

Il suffit parfois d’une écoute, d’un clic, d’un nom qui passe sur un line-up, pour flasher, littéralement, sur l’énergie d’un artiste. En juillet dernier, on flashait, littéralement, sur l’une des gagnantes du tremplin Astropolis. Elle s’appelle Dr. ELFA, elle vient de Caen et a décidé, il y a quelques années, de venir te soigner l’oreille. Prêt à passer sur le billard, samedi, pour Heeboo présente #TTBM ?

Pas de tune, ni de temps, puis sacrément peur de s’immiscer dans un monde essentiellement composé de mecs, c’était ça les peurs de Dr. ELFA avant de réellement se lancer dans le dj game. L’occasion manquée aurait été dommage, mais il en faut du courage pour être une meuf derrière des platines. L’énergie, la force, la vivacité, et beaucoup de fraîcheur dans l’appréhension d’une musique rapide et violente pourtant née il y a des décennies : c’est ça qu’on a aimé chez DR ELFA, depuis sa Normandie natale. Pas pour rien qu’on a décidé de lui faire investir la nuit du mini club, samedi, à La Station-gare des Mines pour l’anniversaire de nos trois ans !

Farah, tu réponds quoi, quand on te demande : « Tu fais quoi dans la vie ? »

Je suis étudiante en médecine, d’où le jeu de mot avec mon blaze, avec un petit clin d’œil à Dr.Macabre aka Lunatic Azylum 

Tu viens d’où ? T’as grandi où ?

Je fais mes études à Caen, en Normandie, mais sinon je viens de saint Lo, petite contrée dans le beau pays Manchois.

Comment on fait la fête d’où tu viens ?

En campagne, plus dans la manche, avec des assos genre Brume, les FITN, Gritz, les Moutons Électriques, les Køsmik Krew, JP50, qui se bougent pour organiser des soirées Techno, de tous genres et styles mais toujours avec la bonne humeur ! Au bout d’un moment on commence à vraiment tous se connaître, et ça devient vraiment sympa de se revoir.

Tu te souviens de ta première soirée en club ? C’était comment ?

C’était peut être bien au 1988 à Rennes, avec mon pote Charlie, on avait rejoint des potes de Granville dans un appart avant d’aller au club, je crois qu’il y avait Lewis Fautzi et Masto (Gritz) qui mixaient. J’avoue que c’était pas la meilleure soirée de ma vie mais on s’est bien marré ! Je me souviens surtout du lendemain où on a galéré à rentrer en stop de Rennes…

Ton plus beau souvenir de soirée c’est quoi ?

Ma première teuf, pendant le mixe de mon grand frère, Frenchtoast, à une Disc and Dance de Gritz dans la manche, j’avais pas dormi de la nuit, sobre au possible, pas encore 18 ans, mais tellement en admiration devant mon frère qui mixait. Ça faisait tellement longtemps que j’attendais ce moment.

La fête ça occupe quelle place dans ta vie ?

C’est un moyen pour décompresser, mes études sont très prenantes, stressantes, et le monde de la musique notamment la culture techno est ma façon à moi de pouvoir souffler, de mettre de côté tous les aléas de la vie, les difficultés que je peux rencontrer. L’un ne va pas sans l’autre, la fête seule n’a pas de sens pour moi, elle doit “célébrer” quelque chose et non pas être l’omniprésence de ma vie.

© Phili Foto


D’après toi, ça vient d’où cette envie de faire toujours plus la fête ?

D’un point de vu global et societal, c’est pour moi l’expression d’une constante envie de rester dans ce monde magique, sans problème, sans difficulté, où tout le monde est content, a le sourire, et ne pense pas à ce qui le préoccupera demain. On a soif d’être exempt de cette pression sociale qui nous tombe dessus dans le travail, dans les études, dans les relations sociales. La fête est un monde où tout est possible, c’est ce pourquoi on y a beaucoup associé les produits (drogues/alcool), le sexe, les after à n’en plus finir…Mais pour moi la vrai vie, c’est pas ça. La vraie fête est là comme le réconfort après un effort, peu importe soit-il, la fête doit avoir un sens et ne pas être une priorité. 

Toi, c’est quoi qui te pousses à sortir le soir ?

Passer du temps avec mes potes que je ne vois pas souvent, si c’est aller traîner dans les bars à Caen. Mais si c’est sortir pour aller danser en soirée Techno, c’est tout autre chose. J’y vois plus quelque chose de personnel, un moment où je peux enfin penser à moi, danser, mater le DJ, comment il mixe, quels sons il kiffe, comment il vit le moment avec les gens qui sont autours de lui envoûtés par sa musique. J’adore me nourrir du show d’un DJ, qu’il bouge ou pas, c’est pour moi une façon d’essayer de comprendre pourquoi il joue tel track à tel moment ! Pour illustrer ça, il y a la Boiler Room de Marvy Da Pimp, le mec est tellement patient…

T’en penses quoi des after ?

J’en pense qu’au bout d’un moment faut songer à aller se coucher !

Ton record de nombre d’heures de fête ?

30 minutes

Au bar tu commandes quoi ?

Darber 33 


Au bar, c’est quoi le truc que tu commanderas JAMAIS ?

De la House

Y’a quoi sur ton rider quand tu joues ?

Deux platines vinyles, une table de mix, de l’eau, et Darber 33.

Tu penses quoi des gens qui demandent des clopes sur leur rider ?

Je pense pas aux gens qui fument, ils en valent pas la peine …

T’es plutôt drogue dure ou drogue douce ?

J’aime vraiment pas cet amalgame Techno = Drogue. C’est une musique qui se veut hypnotique à son état de base, pas de besoin de produits pour kiffer. Ce qui serait bien c’est de faire des soirées de concept plus tôt dans la journée pour ne pas inciter les gens à prendre des trucs pour tenir. Un 18h-4h c’est vraiment sympa, et potentiellement faisable sans rien. 

Comment t’as décidé de devenir dj ?

Mon frère, ses vinyles, ses platines qui à force de tourner m’on envoûtée. Le vinyle c’était presque évident pour moi, je suis pianiste de base, j’ai été habituée à avoir un toucher avec la musique. Après le moment où j’ai décidé de mixer, c’était déjà plus compliqué. J’ai toujours rêvé de le faire, mais je n’ai jamais osé, parce que c’était pas un monde de meuf, parce que j’avais pas les thunes pour avoir le matos, parce que j’avais pas forcément le temps de m’y consacrer. Mais je suis contente d’avoir persévéré et de réussir à m’éclater dans la Techno aujourd’hui. 

La musique que t’aimes le plus en trois mots.

Hardcore Industriel Noise

Jouer pour l’anniversaire des 3 ans de Heeboo, ça représente quoi pour toi ?

C’est un honneur, car jamais je n’aurais imaginé jouer à un événement comme celui ci, avec des artistes comme Isabella. Adeline m’a repérée lors de mon passage à Astropolis, et je suis flattée de savoir qu’elle a envie de me faire jouer pour fêter les trois ans de ce qu’elle a créé de ses propres mains. 

D’ailleurs, comment t’as découvert Heeboo ?

Je crois que c’est Heeboo qui m’a découverte

À ton avis, tu seras quel type de teuffeur dans dix ans ?

Toujours la même, mais un peu plus chiante 

Adeline Journet

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