La famille de l’underground. Loin de Paris. L’union et la force. L’unité d’identités qui se rapprochent. L’homogénéité dans la diversité. Une mission : la liberté dans la fête et la musique avant tout. Et basta ! Positive Education depuis Saint-Etienne, Metaphore Collectif depuis Marseille, Brothers From Different Mothers depuis Lyon à leurs débuts, trois collectifs qui ont fait évoluer voir complètement changé le paysage musical électronique de leurs environs à eux. Une envie, presque un coup de tête. Un véritable besoin. Une nécessité à la nuit. Et une certitude, rien à envier à Paris !
On fait quoi dans vos villes distinctes (donc Saint-Etienne, Lyon et Marseille) un jeudi à 19 h ? Et un samedi à 4 h du matin ?
Julie (Metaphore Collectif) : Un jeudi à 19 h on se prépare à assister au plus beau des couchers de soleil de France à Malmousque autour d’un petit verre. Un samedi à 4 h du matin, on transpire et on expulse toutes les tensions de la semaine sur le dancefloor du Meta.
Charles (Positive Education) : Le jeudi comme le samedi, chez les potes ou en teuf. Peu de soirées dans notre délire. Du coup si on organise pas, on fait la fête dans des appart.
Quelle a été l’impulsion, chacun de votre côté, qui a fait naître vos collectifs respectifs ? Un manque, un besoin, un coup de tête ?
Julie : Metaphore Collectif est né sur un coup de tête, mais surtout de la volonté de secouer vigoureusement le paysage nocturne marseillais. En 2010, Nicolas, Rafael et Norman ont décidé de se réunir autour de leur passion commune pour les musiques électroniques et d’inviter à Marseille des artistes provenant d’une scène qui n’était pas – ou très peu – représentée à l’époque. Très vite, le collectif s’est structuré autour de ses membres, plusieurs personnes ont rapidement rejoint l’aventure, comme Simon, Ugo, Chloé, Emilie et moi même. Dès lors, Metaphore Collectif est devenu à la fois un promoteur événementiel, mais aussi une structure de réunion et diffusion des artistes locaux, le tout sur fond d’ambiance familiale car tous les membres qui composent le collectif sont très intimement liés, c’est peut être d’ailleurs ce qui fait sa force et sa singularité. Ce n’est que plus tard que le Meta – qui est notre local associatif, lieu de vie et de teuf libre – a vu le jour. Dans quelques semaines, on lance notre premier label. Disons, que l’élément déclencheur à la base de la création de Metaphore Collectif ça a vraiment été un manque, mais qu’aujourd’hui notre moteur c’est surtout la richesse de la scène locale marseillaise, le potentiel de notre ville et de son super public.
Julie : « La propension à se faire soi même, le désir de casser les codes »
Vous pensez quoi, chacun, des noms des autres ?
Charles : On est ultra fan des symboles, BFDM et Metaphore Collectif ça donne le ton, c’est une poésie qui nous rassemble. Cette esprit de partage, ce truc no material, dans l’invisible et hors du commun.
Un truc particulier qui vous rapproche, tous les trois, avec ces collectifs ?
Julie : La propension à se faire soi même, le désir de casser les codes, la simplicité dans la mise en oeuvre et la volonté de placer la musique au centre de toute démarche.
Charles : On parle la même langue, on partage un grand nombre de point de vue. Fier des potes !
Un truc que vous enviez (même ne serait-ce qu’un peu) à la scène parisienne ?
Julie : Ahahahahahahaha. Non plus sérieusement, le seul truc que j’envie à la scène parisienne c’est Marc Resplandy. Viens à Marseille wesh !
Charles : Marc on fait une collocation ?
Un truc qu’au contraire vous n’enviez mais ALORS PAS DU TOUT à la scène et.ou au public parisien ?
Julie : L’effet de bande dans le milieu du son qui laisse plus d’un super artiste sur le carreau, va savoir pourquoi ! La compétition entre orgas, un certain manque de simplicité peut-être dû à la nécessité de se démarquer face à la quantité d’événements proposés et le public grandissant, le combo grave too-much et dépassé BDSM / GHB : rien de plus triste que de voir cette tendance souiller de la bonne musique. Heureusement, on sait bien que la fête à Paris ce n’est pas que ça, mais ça refroidit au max quand même…
Charles : Le délire un peu trop stricte dans les teufs, et parfois le manque de connexion profonde avec la musique. Lors de notre festival à Paris, le lendemain pour la teuf de Brice, La Vibe, à Concrete, on a croisé des mecs qui soit disant nous adorent et aiment les artistes qu’on programme mais qui n’étaient pas à La Station. Donc bon ? On se pose la question .
Ce quoi le truc que vous aimez le plus les uns des autres, tous les trois ? Vous vous connaissez bien en vrai ?
Judaah : « J’ai une confiance aveugle en Marc Resplandy »
Au final, je suis une meuf chanceuse, qui est entourée des mecs les moins cons de toute la scène électronique française. Voilà tout !
Charles : On commence à se connaitre oui. On s’est tous rencontrés en teuf . On est tous très différents, et ça nous amène il me semble, à affiner nos points de vue, avec une belle philosophie.
Vous êtes réunis pour cette date du 28 juillet par 75021, c’est un collectif dont vous vous sentez proche ?
Judaah : Marc est l’un des premiers à avoir booké du BFDM sur Paris (Guilty dogs au Batofar, 75021 au 6b, 75021 à la Station j’ai une confiance aveugle en lui, y’a pas beaucoup de programmateurs avec qui j’ai envie de bosser, ça s’est toujours bien passé avec, donc toujours chaud de m’associer avec quand il propose quelque chose.
« Charles : Marc c’est notre tonton, la sagesse, un putain d’ami »
Charles : Marc c’est notre tonton, la sagesse, un putain d’ami. On ira là ou il nous dira d’aller. Ça dépasse la confiance. On est des alliés, des amis.
Y’a d’autres collectifs parisiens dont vous vous sentez proches ?
Julie : Kaliante, parce que Luka c’est le sang de la veine. Fusion mes couilles, parce que Emile c’est un vrai mec et ses line-up défoncent toujours. Dark&Coquin qui sont nos tontons préférés. Champ Libre, car il ne faut pas oublier qu’il y’a un an à peine, ils étaient dans toutes les bouches et les seuls à niquer le système. Qui Embrouille qui, parce qu’on aime les bagarres auditives et les vraies meufs aux platines. Toute l’antenne parisienne de LYL radio, brillamment menée par queen OKO DJ. Et Concrète, à qui on ne peut que vouer beaucoup de respect.
Charles : Avec Concrete on s’entend super bien. Il y a aussi Fusion mes couilles, Sport National, La Station, Bruits de la Passion dont on adore tout le travail …
Vous trouvez que la nuit a changé à Saint-Etienne comme à Lyon ou à Marseille, depuis la naissance de vos collectifs respectifs ?
Julie : J’ai la sensation oui ! Je pense que quelque part, notre determination a poussé d’autres collectifs à voir le jour, et ça c’est une mini victoire quand même. Je n’ai pas la prétention de dire qu’on a été un modèle, loin de là, mais disons qu’on a peut-être planté des petites graines dans les têtes des marseillais, et suite à ça certains se sont bougés pour essayer de faire bouger la nuit.
Julie : « La fête sans la liberté, franchement ça ne me dit plus rien du tout »
Charles : On l’a ressenti à un moment, mais Saint Etienne est une ville de passage pour un grand nombre d’étudiants, donc la ville d’une année à l’autre change. On pense toutefois que la curiosité via l’aura du festival développe la culture.
Pourquoi les jeunes d’aujourd’hui reviennent autant à ces sonorités très techno post_punk et ebm d’après vous ? Mode ou véritable réaction sociale ?
Judaah : Julie a très bien résumé la chose !
Charles : C’est qu’une étape de plus dans le circuit temporelle de l’art. On sent déjà que ça s’essouffle.
Un track pour illustrer le mood de chacun de vos collectifs ?
Charles : Voices – Tornado Wallace (c’est beau ça ! heinnn ??)
Y’a un truc à visée sociale, rebelle ou protestataire dans les moods de vos collectifs ? Une envie de changer les choses, le monde, les esprits ?
Julie : Je suis assez d’accord, car la musique doit être au centre. Mais pour Metaphore Collectif, il s’agit clairement d’une prise de parti contestataire et politisée en faveur de tous les codes de l’anarchie, notamment avec la gestion du Meta – zone libre. Pour nous la musique est un outil pour rassembler et unir, et sert à porter un message collectif. Se réunir toutes les nuits pour danser sans avoir peur du regard des autres, dans un espace safe et accueillant, n’est pas un acte anodin…
Judaah : « On passe notre vie enfermé dans des bureaux donc quand arrive le week end on lâche tout car on a tous besoin de décompresser. »
Charles : Ouais, certains d’entre nous sont dans l’utopie, ou juste un peu trop rêveur. Voir changer notre ville, s’améliorer, les consciences s’élever. Évidemment c’est une idée folle, mais la taille de Saint Etienne nous permet d’y croire.
Une idôle ou égérie ?
Judaah : Jean Marie Bigard (beaucoup de rigolade chez BFDM, pas trop de remise en questions, c’est ce qui fait la force du collectif)
Julie : Eric Selva, le doyen. Il vient à chacune de nos soirées, il aide tous les collectifs marseillais en faisant du bénévolat, il se donne vraiment pour faire bouger les choses. On ne parle pas assez d’Eric Selva !
Charles : Jayce et les conquérants de la lumière
La fête libre pour vous c’est… une option, un caprice ou un besoin ?
Julie : Une nécessité. La fête sans la liberté, franchement ça ne me dit plus rien du tout. D’ailleurs, en club, je me comporte malgré moi comme une petite sauvage : je n’arrive plus à saisir les codes, je n’arrive surtout plus à comprendre pourquoi je ne devrais pas m’assoir ici, mais que là je peux…
La fête libre de nuit, elle change quoi au jour, au quotidien des gens ?
Julie : Je me plais à croire qu’en donnant un espace de liberté aux gens, que ce soit la nuit ou le jour d’ailleurs, ça change peu, on arrive d’une part à les faire relâcher la pression que la société fait reposer sur leurs épaules chaque jour, et d’autre part à les faire réfléchir à comment être davantage libres, respectueux et bienveillants les uns avec les autres dans leur quotidien. Finalement, là est toute la finesse de notre entreprise : c’est en distribuant des clés aux membres qui composent notre public que le modèle pourra être reproduit à l’infini pour créer un monde avec beaucoup plus de libertés. Ce serait un rêve !
Charles : La normalité. On est pas forcés de mal vivre les barrières. Par exemple, une salle non fumeur, ne doit pas empêcher le sentiment de liberté. Il y a un temps pour tout, un endroit pour tout, et on vit en communauté.
Pour finir, une envie pressante, là, tout de suite ?
Judaah : Manger
Julie : Niquer des maires.
Charles : Un grand touki sur l’banc de touche
Un mot les uns pour les autres ?
Julie : BIG LOVE.
Charles : Ouais Big Love.