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Size Pier : « Certains collectifs savent créer une zone de liberté qui n’existe pas légalement dans notre société » – Heeboo

Size Pier : « Certains collectifs savent créer une zone de liberté qui n’existe pas légalement dans notre société »

Interview Nuit - Novembre 28, 2017

Size Pier naît dans les sillons de l’époque Champ Libre, fin 2015. Alors que la bulle de l’ultra-undergound se façonne dans la ferveur de la danse et de la techno. Alors qu’on en intègre ses espaces sombres et confinés seulement sur invitation. Alors qu’on s’y perd et qu’on n’y prend pas de photo. Qu’on se garde d’en parler à voix haute, mais qu’on savoure d’en glisser le nom à voix basse.  Champ Libre. Le trésor à garder secret. L’oasis de la fête qui n’avait jamais existé. Dans la marginalité du conformisme de club, dans l’ombre des sponsoring de platine, Champ Libre, oui, se faisait un nom et Florian Le Rouzic, trouvait le sien : Size Pier.

Il en aura fallu pour façonner la bête. Parce qu’une bête oui. Des platines. Un dj aux allures de rugbyman élevé en club, Size Pier, son arrivée, peut en surprendre plus d’un(e). Parce que son image nous évoque un molosse doux au coeur tendre et affolant. Ses sets racontent cette histoire, celle d’une délicatesse survoltée. D’une musique froide qui aurait pris froid. D’une chaleur qui saurait prendre l’estomac sans jamais prévenir. Size Pier, il se construit au fil des années, de par sa rencontre avec Spunoff aussi et ses virées dans les clubs allemands. Size Pier est aujourd’hui en passe de devenir un grand auquel il ne manquait plus que deux choses : un premier EP mûri, et de jouer en dehors des plates-bandes techno, une Trou aux Biches par exemple ? C’est chose faite ! Le premier EP est sorti il y a trois jours sur RND. Records et il sera samedi 2 décembre en tête d’affiche de la dernière Trou aux Biches de l’année. Bingo ! Et rencontre !

Ta première fête marquante, tu t’en souviens ?

Oui ! Le Sonar a Barcelone c’était aussi mon premier Festival. C’était en 2013. C’était assez incroyable pour une première.

Le truc qui a rendu cette fête inoubliable ?

Le live de Nicolas Jaar. Il nous a fait un live A/V j’avais adoré

Le truc qui aurait pu tout gâcher à l’époque, mais en fait non ?

Le Live de Kraftwerk en show 3D j’en attendais beaucoup mais j’ai été déçu…

Tu écoutais quoi comme type de musique à l’époque ?

J’écoutais justement beaucoup Nicolas Jaar, Air, Boards of Canada avec Alexandre (Spunoff) et notre groupe de potes de l’époque. On allait souvent chez Alexandre, il avait un sound system, des platines et pleins de jeux de lumière dans sa chambre. C’était le feu !

Tu as changé ta manière de sortir au fil des ans ? 

Oui beaucoup ! Entre mon arrivée à Paris de Bretagne, la découverte d’autres pays et puis la création de Champ Libre, oui !

« Au début je ne pouvais pas manger avant un set »

Ton premier dj-set, tu t’en souviens bien ? 

Mon premier set c’était dans une salle de concert a Lorient pour l’anniversaire du Label Bluelephant avec Electric Rescue dont le label était tenu par Romain et Guillaume. La salle était bien, il y avait un bon soundsytem. J’étais hyper stressé par contre avant mon set.

A quel moment tu es devenu résident Champ Libre du coup ?

Dès le début en fait. Alexandre, Antoine, Charles et Samy voulaient monter un festival dans un château à Anger, alors ils l’ont fait ; quand on est revenus sur Paris après cette semaine de folie, on a trouvé un spot et on a commencé a organiser des soirées. Champ Libre était né.

Le truc super important qui a changé entre toi à l’époque et toi maintenant ? 

Ma culture musicale ! J’ai écouté et découvert pas mal de chose depuis !! Et je fais moins de sport…

Aujourd’hui, tu te sens comment, juste avant un set ? 

Stressé !! Un peu moins qu’avant mais c’est toujours là. Au début je ne pouvais pas manger avant un set. Maintenant ça va mieux. Pendant le set, je me sens généralement assez confiant et je commence a réfléchir a l’histoire entre les tracks. Par contre, après je suis toujours super fatigué généralement…

C’est quoi le truc qui te rend le plus heureux quand tu joues ?

C’est de réussir a créer une énergie entre les gens et moi, quand ils dansent. On avait cette chance de pouvoir vraiment bien la ressentir à Champ Libre.

Tu te souviens de ton fail le plus mémorable ?

C’était un set à Champ Libre juste avant Sarin j’avais beaucoup trop bu et tout ce dont je me souviens c’est de la fin de mon set…

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Et ta plus belle nuit sur scène en tant qu’artiste ?

C’est encore a Champ Libre. L’avant-dernière soirée là-bas, un closing de huit heures. C’était incroyable déjà de pouvoir jouer autant de temps et il y a eu cette énergie incroyable dont je parle plus haut… les gens sont restés jusqu’a la fin, super nombreux. C’était inoubliable.

D’après toi, pourquoi les gens font la fête aujourd’hui ?

Les gens font la fête pour oublier leurs semaine monotone. Et pour se sentir libre, libre de toute pression, de toute responsabilité, de toute obligation.

Beaucoup de gens disent qu’aujourd’hui la fête ne peut plus être politique, t’en penses quoi ?

Je pense qu’on fait toujours la fête de façon politique mais à une plus petite échelle. Des collectifs comme Métaphore ou Champ Libre font la fête de façon politique. Ils savent encore créer une zone de liberté qui n’existe pas légalement dans notre société, et cela contre l’interdiction du système mis en place. Ce qui n’est plus le cas du Rex par exemple ou d’autres clubs.

Tu t’es déjà dit “plus jamais”, après une fête ? 

Oui ! A chaque Champ Libre… mais ça ne dure que quelques minutes (sourire)

Et si tu vas encore en club, qu’est ce qui t’incite à y mettre les pieds ?

Un bon line up !

Adeline Journet

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